L. KISSI *, S. HAITAMI *, A. JADDAOUI **, I. BENYAHYA *
* Service d’Odontologie Chirurgicale, CCTD, Casablanca
Faculté de médecine dentaire de Casablanca. Maroc
Université Hassan II
** Médecin dentiste du privé.Casablanca, Maroc
RÉSUMÉ
En odontologie, les déchets des activités de soins sont de deux types :
1- Les déchets ménagers ou assimilables ;
2- Les déchets médicaux ou de soins.
En égard de l’importance de la production de ces déchets, les risques de contamination de l’homme et de l’environnement sont multiples.
La gestion des déchets des activités de soins est donc capitale, elle doit respecter les cinq étapes fondamentales de tri, de conditionnement, de collecte, de stockage, de transport jusqu’au traitement lequel se fait soit par incinération soit par enfouissement.
MOTS CLES : Déchets des activités de soins à risque infectieux, tri, collecte, stockage, traitement.
INTRODUCTION
La gestion des déchets de soins prend de plus en plus d’importance dans le domaine de la santé.
Cet intérêt se rapporte d’une part à l’importance du risque lié à la production des déchets d’activités de soins, et d’autre part aux nuisances que peut engendrer une technique de traitement de ces déchets pour la santé de l’homme et pour l’environnement.
Dans les pays en développement, un danger supplémentaire se surajoute, celui de la fouille des décharges et du tri manuel des déchets récupérés à la sortie des établissements de soins. De même les méthodes de gestion des déchets de soins peuvent elles-mêmes entrainer un risque pour la santé, si les différentes étapes du processus de gestion ne sont pas menées correctement.
Au Maroc, le ministère de la santé s’est engagé à mettre en œuvre des actions visant la prévention et la protection de l’hygiène dans les établissements de soins, notamment à travers un système de gestion des déchets générés par les établissements de soins, dont l’objectif premier est d’éviter la transmission accidentelle des maladies et d’améliorer la qualité de soins
Ce travail permet de mettre le point sut les différents types des déchets d’activités de soins ainsi que les méthodes de gestion de ces derniers.
DÉFINITION ET SOURCE DE PRODUCTION DES DÉCHETS
C’est l’ensemble de substances ou de matériaux résultant d’un processus de production, de transformation d’un ou de plusieurs produits dont la détention ou le dépôt risque de nuire à la collectivité et à son environnement.
Deux catégories de déchets sont produites par les établissements de soins : les déchets ménagers ou assimilables et les déchets de soins.
- Les déchets ménagers et assimilables : issus des activités non médicales et sont constitués des ordures ménagères, des emballages de conditionnement, des déchets administratifs, de balayage …. Cette catégorie de déchets représente 75 à 90% de l’ensemble des déchets des établissements sanitaires.
- Les déchets médicaux ou déchets de soins : Selon l’OMS (1999) , ce sont les déchets issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire.
Les plus importantes sources de production des déchets des établissements de soins sont représentées par les hôpitaux publics, les cliniques semi-publiques et privées suivis par les centres de santé, les laboratoires cliniques et de recherche scientifique sans oublier les cabinets médicaux, les infirmeries et les cabinets dentaires.
TYPOLOGIE DES DÉCHETS DE SOINS (1,2)
Les déchets de soins renferment les catégories de déchets suivantes :
- Les déchets biologiques et /ou infectieux
- Les déchets piquants ou coupants
- Les déchets chimiques
- Les déchets pharmaceutiques
- Les déchets radioactifs
- Les conteneurs pressurisés
1. Les déchets biologiques et/ou infectieux :
Il s’agit de déchets susceptibles de contenir des germes pathogènes (bactéries, virus , parasites) ou leurs toxines, en quantité ou en concentration suffisante pour causer des maladies chez l’homme ou d’autres organismes vivants ex : les pièces anatomiques telles que les dents extraites , les débris osseux et les pièces opératoires de petite taille ainsi que les matières imprégnées de sang et salive comme les compresses souillées, les canules d’aspiration, les carpules anesthésiques, les empreintes prises en bouche, les masques , les gants …(1,2)
2. Les déchets piquants ou coupants :
C’est tout objet ou matériel utilisé pour la réalisation des activités de soins et susceptible de blesser et de présenter un risque de transmission de l’infection. Il s’agit par exemple des aiguilles à sutures ou à injection, des seringues jetables munies d’aiguilles non démontables, des lames de bistouri …(1,2).
3. Les déchets chimiques :
Cette catégorie de déchets comporte tous les produits solides, liquides et gazeux comme par exemple l’amalgame dentaire, les produits acides et corrosifs à savoir les produits utilisés pour la désinfection du matériel et certains matériaux …(1,2,3)
4. Les déchets pharmaceutiques :
Les déchets pharmaceutiques comportent les médicaments et produits pharmaceutiques périmés, les médicaments contaminés, les ampoules ou flacons de médicaments vides ect… (1,2).
5. Les conteneurs pressurisés :
Plusieurs types de gaz sont utilisés dans les établissements de soins. Ces gaz sont souvent stockés sous pression dans des conteneurs cylindriques ou aérosols (médicaments, aérosols d’éthylène) (1,2).
RISQUES LIÉS AUX DÉCHETS DE SOINS
L’ampleur du problème lié aux déchets des établissements de soins, notamment hospitaliers et du secteur privé est déterminée non seulement par l’importance de la production des déchets, mais aussi par le risque d’infection qu’ils représentent pour la santé de l’homme et de l’environnement.
Dans les établissements de soins où les règles d’hygiène générales individuelles ou collectives ne sont pas respectées, des professionnels de santé, mais aussi des patients peuvent être victimes d’infections nosocomiales.
Environ 60% des accidents d’exposition au sang des professionnels de santé surviennent lors de l’élimination du matériel souillé.
En dehors des risques infectieux, chimiques, d’irradiation et de pollution de l’environnement, la notion des déchets d’activités de soins est à l’origine des risques psycho-émotionnels qui se traduisent par la crainte du public, des professionnels de santé ou des agents lorsqu’ils reconnaissent des déchets souillés par du sang, du liquide biologique ou les pièces anatomiques.
Tout individu en contact avec les déchets d’activités de soins est potentiellement exposé aux risques encourus par ces déchets :
- Les professionnels de santé en odontologie qui manipulent les objets piquants et coupants souillés sont exposés aux risques de blessures et d’infections ;
- Les agents de salubrité peuvent être piqués ou blessés par un matériel souillé lors du transport des déchets mal conditionnés ;
- Les récupérateurs peuvent être blessés lors de la fouille ou de la manipulation des déchets au niveau des décharges publiques (1,4).
GESTION DES DÉCHETS DE SOINS
La réduction des risques liés aux déchets est de la responsabilité de la direction de l’établissement ou du cabinet privé. Pour cela, le directeur ou médecin dentiste doit veiller à la mise en place d’un programme de gestion des déchets hospitaliers ou du cabinet dentaire notamment en ce qui concerne : les modalités et les conditions de tri, de traitement, de manipulation, de stockage, de transport et de destruction des déchets.
Pour assumer cette responsabilité, des mesures d’organisation doivent être prises en considérant les préalables nécessaires à la mise en place d’un système de gestion des déchets de soins (1,5) :
- Le développement d’un plan de gestion des déchets de soins;
- L’affectation des ressources nécessaires (humaines, financières, équipements);
- La mise en place de procédures et référentiels de bonnes pratiques;
- La formation et l’information du personnel médical et paramédical aux bonnes pratiques techniques et organisationnelles.
Développement d’un plan de gestion des déchets de soins :
Selon les recommandations de l’OMS, chaque établissement de soins devra préparer un plan même simple de gestion des déchets déterminant les objectifs, les activités , les intervenants et leurs attributions, les ressources nécessaires ainsi que les mécanismes de suivi, de supervision et de contrôle.
Six étapes de base sont recommandées pour l’élaboration de ce plan de gestion des déchets
Le processus de gestion des déchets des établissements de soins quelque soit le secteur public, semi-public ou privé, comprend 5 étapes : le tri et conditionnement, la collecte, le stockage, le transport et le traitement et élimination (6).
- Le tri
Le tri est une opération qui s’effectue au niveau du site de la production et à travers laquelle chaque catégorie de déchets est mise dans un sac ou conteneur qui lui convient et orientée vers une filière précise (Tableau 1).
Une grande vigilance doit caractériser les modalités de tri des déchets afin d’éviter que les déchets à risque ne se mélangent avec les déchets assimilables aux ordures ménagères (5, 6, 7, 8, 9, 10).
Le tri permet de protéger et d’améliorer la sécurité du personnel, de diminuer les risques d’infections nosocomiales et de contrôler l’incidence économique de l’élimination des déchets en réduisant la proportion des déchets à risque à traiter.
Déchets ménagers et assimilables Sacs noirs |
Déchets de soins Sacs rouges ou jaunes |
- Bottes à usage unique - Coiffes à usage unique - Emballages divers - Emballages du matériel stérile - Flacons de perfusion sans tubulure et perforateur - Journaux, papiers - Masques - Plâtres non souillés - Sacs et bouteilles en plastiques vides - Sac du chariot de ménage |
- Champs à usage unique utilisés - Compresses souillées - Gants à usage unique - Matériel à usage unique utilisé - Pansements - Plâtres souillés - Poches de drainage et irrigation - Seringues - Tubes divers - Tubulures de perfusion - Verre souillé |
Tableau 1 : Tri des déchets selon la catégorie et la couleur des sacs (1)
- Le conditionnement
Il est destiné à contenir les déchets de soins. Il constitue une barrière physique contre les micro-organismes pathogènes qu’ils contiennent (1).
Il permet de garantir la sécurité des personnes susceptibles d’être exposées et notamment de prévenir les Accidents d’Expositions au Sang (AES) de l’ensemble des acteurs de la filière d’élimination des Déchets d’Activité de Soins à Risque Infectieux (DASRI) et assimilés (4).
Le médecin dentiste se doit d’avoir différents dispositifs pour le conditionnement facilitant leur traitement.
Le conditionnement recommandé pour les différentes catégories de déchets est le suivant :
- Les déchets d’activités de soins non dangereux, analogues aux ordures ménagères, doivent être conditionnés dans des sacs ou collecteurs étanches de couleur noire (2);
- Les déchets piquants ou coupants, dans tous les cas considérés comme infectieux, dés leur production, doivent être mis dans des collecteurs rigides et étanches de couleur rouge ou jaune . Cette rigidité permet d’éviter tout risque de perforation du collecteur qui exposerait les manipulateurs à des blessures susceptibles de s’infecter. Ces collecteurs doivent être d’un volume adapté au rythme de production.
- Les déchets infectieux non piquants ni coupants, doivent être placés dans des sacs étanches de couleur rouge ou jaune (6).
Les sacs des déchets infectieux doivent être en plastique et doivent être obligatoirement traités.
- Les déchets anatomiques qui sont constitués par les organes doivent être désinfectés et bien emballés et puis remis aux services compétents (bureaux municipaux d’hygiène) pour enfouissement (1). En odontologie, les déchets anatomiques sont essentiellement représentés par les dents qui sont extraites
- Enfin, les produits chimiques ou pharmaceutiques doivent être collectés dans des collecteurs étanches de couleur marron
Il est recommandé que les sacs et conteneurs des déchets de soins portent des symboles internationaux de risque, comme par ex : le symbole de risque biologique pour les déchets infectieux et biologiques
- Les emballages
La disponibilité des collecteurs à déchets est une garantie de sécurité pour l’ensemble de la filière de gestion des déchets de soins. Chaque unité de soins doit disposer :
- D’un collecteur pour déchets piquants et coupants;
- D’un collecteur pour déchets infectieux et/ou biologiques ;
- D’un collecteur pour déchets assimilables aux ordures ménagères.
Les collecteurs pour déchets doivent être rigides, étanches, avec une ouverture suffisante, incinérables (ne contenant pas de composés chlorés) et d’un volume adapté à la production des déchets
Les conteneurs destinés à contenir des objets piquants et coupants sont des boites en polyéthylène de différentes capacités (1,4 litres, 3 litres, 7,6 litres)
Le conteneur doit être identifié soit à l’aide de sa couleur rouge ou jaune soit par inscription qui indique le danger de sa manipulation par les patients, les enfants, ect (1,11).
Les DASRI et assimilés sont collectés dans des emballages à usage unique qui répondent à des normes et doivent :
- Pouvoir être fermés temporairement ;
- Pouvoir être fermés définitivement avant leur enlèvement ;
- Etre de couleur dominante jaune ;
- Porter l’étiquette de danger biologique ;
- Porter la mention « Déchets d’Activités de Soins à Risques Infectieux » ;
- Posséder un repère horizontal pour la limite de remplissage ;
- Etre obligatoirement placés dans des grands récipients pour vrac (GRV) ;
- Identifier le producteur du déchet sur chaque emballage (12,13).
- La collecte
C’est le trajet depuis le site de production ou les zones de stockage intermédiaire des déchets jusqu’à la zone de stockage central.
Il est recommandé, pour les établissements hospitaliers (secteur public et privé), de faire réaliser la collecte par une équipe de salubrité composée d’un personnel formé. Les horaires de collecte doivent être fixés par le gestionnaire de la structure de soins.
La collecte doit être réalisée avec une fréquence adaptée au rythme de production des déchets afin d’éviter toute accumulation des déchets dans les unités de soins.
- Le stockage ou entreposage (Tableau 2,3)
Lorsqu’un établissement comporte plusieurs unités productrices de DASRI, il est possible de créer des entreposages intermédiaires (stockage des déchets pour un ou plusieurs services) , où les emballages pleins sont déposés temporairement avant leur déplacement vers le lieu d’entreposage centralisé (stockage de l’ensemble des DASRI) d’où les déchets seront enlevés en vue de leur élimination.
Dans un souci de traçabilité, il est recommandé à chaque unité productrice de DASRI de noter sur les emballages pleins, ses coordonnées et la date d’entreposage des déchets (14, 15).
Les détails d’entreposage sont fonction des quantités de DASRI produits et du lieu d’entreposage (12).
Lorsque les quantités sont inférieures à 5kg/mois, les DASRI doivent être tenus à l’écart des sources de chaleur.
Lorsque les quantités sont supérieures à 5kg/mois, le local de stockage doit être exclusivement réservé à l’entreposage des déchets.
Que ce soit le local de stockage intermédiaire ou le local de stockage central qui dispose de deux locaux distincts : l’un pour les déchets ménagers (sacs noirs) et l’autre pour les déchets de soins à risque (sacs rouges ou jaunes), les locaux doivent être situés loin des bâtiments hospitaliers, des blocs opératoires et de la cuisine. Ils doivent être facilement accessibles de l’extérieur et leur localisation doit être étudiée par rapport au fonctionnement de la structure de soins (6,7,16,17).
QUANTITES PRODUITES SUR UN MEME SITE | DUREE D’ENTREPOSAGE AUTORISEE |
< 5Kg/mois | 3 mois |
>5Kg/mois et 100Kg/semaine | 7 jours |
100Kg/semaine | 72 heures |
Tableau 2 : Délais de stockage des DASRI sur le lieu de production (12)
QUANTITES PRODUITES SUR UN MEME SITE | DUREE D’ENTREPOSAGE |
< 100 Kg/semaine | >100KG/semaine |
7 jours | 72 heures |
Tableau 3 : Délais de stockage des DASRI en centre de regroupement (4)
- Le transport
Il couvre le transport du site de stockage au site de traitement, il peut s’agir du transport pour un traitement interne ou externe à l’établissement.
Le chauffeur doit être à jour de ses vaccinations concernant l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la polio. Il doit être muni d’équipements de protection individuelle (EPI) : vêtement fluorescent, gants, chaussures de sécurité, tenue de travail enveloppante, lingettes désinfectantes ou solution hydro alcoolique.
La plaque étiquette indiquant un danger biologique doit être apposée à l’arrière lorsque le chargement est supérieur à 3 tonnes (13).
TRAITEMENT ET ÉLIMINATION DES DÉCHETS DE SOINS
L’objectif principal du traitement des déchets à risque est de réduire la quantité de germes pathogènes dans les déchets.
La réduction du volume devra être considérée en deuxième priorité. Actuellement, beaucoup de technologies de traitement sont appliquées dans le monde.
Le traitement par broyage a été largement pratiqué, mais d’autres solutions apparaissent peu à peu comme l’autoclavage ou le traitement chimique ou par micro-ondes qui pourraient être préférables dans certaines conditions.
L’enfouissement in situ des déchets à risque non traités peut également être une solution acceptable pour certains déchets (ex : objets piquants et tranchants) si les conditions de sécurité sont respectées et s’il y a suffisamment de terrain au niveau de l’établissement de soins.
Il est recommandé que tout enfouissement des déchets en dehors de l’établissement de soins doit être précédé par un prétraitement pour garantir un transport sans risque au site d’enfouissement.
Les avantages, les inconvénients et les contraintes doivent être prises en compte par les établissements de soins lors du choix de la technique de traitement à adopter (1).
L’incinération est un traitement thermique basé sur la combustion avec excès d’air.
Il permet de réduire la masse des déchets jusqu’à 70% et leur volume jusqu’à 90% (13).
Les effluents liquides des établissements de soins, doivent également subir un traitement car ils peuvent contenir plusieurs agents potentiellement dangereux comme les bactéries, les virus et les helminthes qui sont facilement transmises à travers l’eau.
Ils peuvent aussi contenir des produits chimiques, pharmaceutiques et radioactifs dangereux tels que les produits de nettoyage et de désinfection, le mercure des amalgames, les effluents du service de radiologie (18).
Le principe de base pour une gestion adéquate des effluents liquides est de minimiser le rejet des effluents dangereux à l’égout et de mettre en place un système local pour le traitement, l’élimination ou la réduction de la pollution chimique, biologique …
Les effluents liquides des établissements de soins qui sont chargés par des agents biologiques, chimiques, pharmaceutiques et radioactifs dangereux doivent subir un prétraitement avant rejet à l’égout.
Le type de prétraitement à mettre en place dépend de la taille de l’établissement de santé, de l’existence d’un système de gestion des eaux usées urbaines (système de collecte connecté à une station d’épuration des eaux usées) et surtout des ressources financières (1,15,18,19).
Circuit de la pollution mercurielle
En raison de la toxicité du mercure, la production mondiale de ce dernier a diminué de 50% depuis 30 ans.
Dans les cabinets dentaires, bien que l’usage de l’amalgame soit en légère diminution, on rapporte qu’il est utilisé encore 10 à 15 tonnes de mercure par an et qu’on retrouvait les résidus (environ 7 tonnes) dans les ordures ménagères et les eaux usées (16).
Les excédents de préparation d’amalgame sont des déchets secs qui pendant longtemps ont pris le circuit des ordures ménagères. Arrivé en décharge, le mercure finit toujours par rejoindre la nappe phréatique. Si les ordures ménagères sont incinérées comme c’est le cas maintenant, le mercure sous forme de vapeur, engendre une pollution atmosphérique et mêlé aux eaux de pluie entrainera là encore une contamination des eaux.
Par ailleurs, les déchets humides qu’on retrouve à la sortie des crachoirs et des aspirations passent directement dans le circuit des eaux usées et contaminent les stations d’épuration.
En France, un arrêté du 30 mars 1998 a fixé les conditions dans lesquelles les déchets d’amalgame doivent être éliminés. En voici ci-après les extraits les plus importants :
Art 2 : Les déchets secs et liquides d’amalgames dentaires sont, dés leur production, séparés des autres déchets.
Les déchets secs d’amalgames dentaires, les déchets d’amalgames contenus dans le pré-filtre et les capsules de pré-dose sont conditionnés dans des emballages identifiés à usage unique, étanches à l’eau en toutes positions, résistant à la perforation, stables et présentant une fermeture provisoire et une inviolabilité complète lors du transport.
Les effluents liquides contenant des résidus d’amalgames dentaires sont évacués vers le réseau d’eaux usées après passage dans un séparateur d’amalgame.
Le séparateur d’amalgame retient, quelle que soient les conditions de débit, 95% au moins, en poids, de l’amalgame contenu dans les eaux usées.
Le séparateur d’amalgame est installé le plus près possible de la confluence des sources de rejet.
Art 3 : Avant l’installation d’un séparateur d’amalgame dans un cabinet dentaire en activité, les boues d’amalgame déposées dans les conduites de faibles pentes, avant le réseau d’assainissement public, doivent être récupérées.
Art 4 : Les résidus d’amalgame dentaire contenus sans le séparateur d’amalgame sont éliminés selon une périodicité permettant le maintien du rendement initial du système.
L’article 5 précise les conditions de transport et définit les bordereaux de prise en charge et suivi.
L’article 6 indique l’obligation de passer une convention avec un prestataire de service définissant les conditions de conditionnement, de collecte, d’entreposage et de transport vers un site de valorisation (20).
SITUATION ACTUELLE AU MAROC
La comparaison de la gestion des déchets des activités de soins en Europe et l’état actuel de la gestion des déchets médicaux au Maroc a pu montrer que la France possède une réserve importante de loi et de circulaire sur la gestion des DASRI, en particulier :
- Le code de l’environnement (décret du 18 avril 2002 relatif à la classification des déchets et Arrêté ADR relatif au transport de matières dangereuses par route) ;
- Le code de la santé publique (Arrêté du 7 sept 99 relatif à l’entreposage, Arrêté du 7sept 99 relatif à la traçabilité, Arrêté du 23 nov 03 relatif aux emballages) ;
- Le code du travail (protection des travailleurs contre les agents biologiques).
Les différentes étapes sur lesquelles la réglementation française incite le respect sont les suivantes :
Le tri à la source, le conditionnement, les locaux et le délai de l’entreposage, le transport, le traitement (incinération ou désinfection) et enfin la traçabilité.
Pour ce qui est du Maroc, ce n’est qu’en 2003 qu’a vu le jour la première loi en relation avec la protection de l’environnement. (Loi 11-03 relative à la protection et la mise en valeur de l’environnement).
En décembre 2006, a été publiée la première loi relative à la gestion des déchets solides en général et les déchets médicaux en particulier : il s’agit de la loi 28-00 qui traite dans les articles 6 et 7 du chapitre II du titre I , la gestion des déchets en général et dans les articles 38,39,40 et 41 du titre V celle des déchets médicaux et pharmaceutiques.
Ce n’est qu’en avril 2009 que cette loi est devenue applicable uniquement par le secteur public.
Malgré cette mobilisation active de la part du Maroc, il reste encore plusieurs défaillances à savoir :
1. Le secteur privé demeure retissent et n’applique pas les lois ;
2. Absence de pénalités ;
3. Le manque de formation du personnel dans les secteurs où la gestion des déchets est réalisée de façon conforme ;
4. Problèmes au niveau de la classification des déchets produits dans les centres et établissements sanitaires ce qui engendre un mauvais tri ;
5. L’inexistence de protocoles internes de gestion (sauf exception) ;
6. Absence de circuit propre /sale pré-établi ;
7. Tri inadéquat des objets piquants coupants tranchants ;
8. Problèmes au niveau de la collecte :
La totalité des déchets produits dans les centres et établissements sanitaires sont recueillis dans des sacs sans qu’il ne soit utilisé un récipient spécifique ;
9. Stockage intra-hospitalier : pré-stockage inadéquat au niveau des étages et des services de certains hôpitaux ;
10. Absence de mesure d’hygiène dans les lieux d’entreposage de même, les conteneurs ne sont pas désinfectés après chaque utilisation.
CONCLUSION
Les DASRI présentent une menace pour l’environnement interne et externe de l’hôpital, chose qui rend leur gestion indispensable et intégrale touchant toutes les étapes du processus depuis le tri à l’élimination.
Plusieurs facteurs tendent à maintenir et influencer le problème de gestion de ces déchets à savoir :
* Le vide juridique : qui laisse la responsabilité de gestion des DPT (Déchets Piquants Tranchants) non réglementée ;
* Manque d’un plan de gestion qui tient compte des coûts liés à cette gestion et qui trace des prévisions pour doter la ligne budgétaire destinée à la gestion des DASRI en fonds nécessaires pour le secteur privé ;
* La formation et l’information : surtout en matière de notion de risque (infectieux), les mesures d’hygiène de base (suivi médical et vaccination), les enjeux de la bonne gestion des Déchets piquants coupants tranchants (image de marque de l’établissement) et les procédures en cas d’incident et d’accident du travail.
L’amélioration de la gestion des déchets piquants coupants tranchants au niveau des établissements de soins reste tributaire de la volonté des décideurs et doit rentrer dans une stratégie globale de gestion des déchets hospitaliers voire une stratégie régionale en se penchant sur la coordination et la collaboration des autres intervenants en matière de gestion des déchets.
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