H. TRIKI ; S. BEKRI ; M. TRABELSI

Service de Prothèse Partielle Amovible
Faculté de Médecine Dentaire Monastir

 

RÉSUMÉ

L’objectif primordial du traitement d’un édentement partiel est de rétablir la fonction occlusale, mais dans le cas où l’édentement est bordé par une dent antérieure notre objectif sera aussi de rétablir l’esthétique.

 

A travers un cas clinique, nous allons discuter l’apport d’un attachement axial sur les deux plans esthétique et fonctionnel ainsi que les clés de réussite de ce traitement prothétique qui doit répondre impérativement aux règles régissant la réalisation des prothèses composites.
Mots clés : attachement axial, montage directeur, paralléliseur.


INTRODUCTION

Un résultat esthétique non satisfaisant constitue l’une des causes les plus fréquentes de refus d’une prothèse  partielle amovible conventionnelle, surtout dans le cadre d’un édentement partiel bordé par une dent antérieure.
Face à la visibilité des crochets indispensables à la stabilité et à la rétention de la PAP, le praticien doit  employer les moyens adaptés pour mieux intégrer la PPA sur le plan esthétique.

Dans cette optique, la réalisation d’une chape munie d’un attachement axiale sur une racine résiduelle bordant un édentement distal peut constituer l’une des solutions proposées (1).
Mais la difficulté réside dans le choix du système d’attachement axial adéquat ; ainsi qu’au niveau de la mise en œuvre dont la particularité sera décrite à travers ce cas clinique.


PRESENTATION DU CAS

Il s’agit d’un patient âgé de 45 ans, présentant un édentement de CLIImod1 de Kennedy au maxillaire bordé par la 24 à l’état de racine, antagoniste à une mandibule dentée (Fig.1).

 

Vue de l’édentement maxillaire bordé par la 24 à l’état de racine opposé à une mandibule complètement dentée.


La rétro alvéolaire sur la 24.
Le motif de consultation est principalement fonctionnel pour remplacer les dents absentes, et améliorer l’efficacité masticatoire. Cependant  le motif esthétique doit être pris en considération puisque l’édentement est bordé par la canine.   
La dimension verticale d’occlusion est conservée, ainsi que la position d’intercuspidation maximale, le facteur dento parodontal étant favorable au niveau de toutes les dents résiduelles.
Il est a noté qu’au niveau de la racine de la 24, le délabrement est supra osseux (Fig.2).


Analyse biomécanique de l’édentement (2,3,4)

La réussite de toute restauration sur le plan biomécanique se base sur une démarche analytique, qui reste inchangée pour les différents types d’édentement et qui vise à optimiser l’équilibre prothétique en assurant la triade de Housset (rétention, stabilisation , sustentation). L’analyse biomécanique de ce type d’édentement montre que :


- L’axe de rotation principal passe par les appuis occlusaux  bordant l’édentement.
Ce qui est nocif pour les tissus d’appui notamment pour la dent bordant l’édentement. C’est pourquoi, il est impératif de le neutraliser par l’utilisation des moyens de rétention controlatérale (Fig.3).
- La sustentation est assurée par les appuis occlusaux au niveau des dents bordant l’édentement, ainsi qu’au niveau du secteur denté controlatéral. C’est pourquoi on dit que la PPA à châssis métallique dans ce cas est  exclusivement dento-supportée.
- La stabilité est assurée puisque le châssis métallique s’inscrit parfaitement à l’intérieur de l’aire de sustentation (Fig.4).

 

L’axe de rotation principal  est neutralisé par l’utilisation des moyens de rétention controlatérale. La conception prothétique se trouve à l’intérieur du polygone de sustentation.

 


Suite à cette analyse, on peut conclure que cet édentement -bien que terminal- ne pose pas de problème majeure sur le plan biomécanique étant donné qu’il se limite à une seule dent, et que la présence de l’édentement encastré contro latéral est en faveur d’une meilleure stabilité prothétique.

 

Choix et discussion de la décision prothétique (5,6,7)

 

 

  ppa a chassis metallique conventionnelle avec un cochet dont le bras vestibulaire est inesthetique  


- La solution implantaire est envisageable pour ce cas, mais elle reste en dehors des capacités financières du patient,
- La prothèse fixée est écartée du fait de l’étendu de l’édentement qui s’étend de la 23 à 27,
- Donc, on a opté pour une  PAP à châssis métallique avec un crochet sur la 24 (après sa reconstitution corono-radiculaire), mais le faite d’utiliser cette dent comme support d’un crochet présente un double problème :
- Esthétique étant donné la visibilité du bras vestibulaire (5) (Fig.5),
- Au niveau de la pérennité de la dent, puisque la force transversale développée par le crochet au cours de l’insertion et la désinsertion de la prothèse amovible risque de  la mobiliser (1).

 

  Deux crochets du coté de l’édentement : un crochet anneau sur la 27 et un crochet ackers sur la 16 alors qu’au niveau de la 23, on se limite à un appui cingulaire et sur la 14 c’est un appui occlusal.  


Dans ce cas, le recours à un attachement axial supra radiculaire peut nous offrir une rétention tout en répondant aux impératifs esthétiques, puisqu’il nous permet de supprimer le bras vestibulaire du crochet antérieur (6,7). Toutefois, il faut savoir qu’en aucun cas, ce système ne peut à lui seul assurer la rétention de la prothèse. C’est pourquoi nous ne pouvons s’affranchir des crochets du coté de l’édentement et du coté opposé à l’édentement (Fig.6).


La présentation du système d’attachement axial choisi

Différents types d’attachements axiaux supra radiculaires sont disponibles, et répondent à des situations cliniques diverses où la conservation de dents et de l’esthétique est prioritaire. Toutefois, nous pouvons les classer en deux types d’attachements intra-radiculaires axiaux selon le type de mouvements qu’ils autorisent :
- Les attachements rigides qui ne permettent qu’un mouvement d’enfoncement lors de la mise en place de la prothèse amovible, et l’inverse pour la désinsertion une fois les pièces emboitées. L’attachement  rigide transmet la totalité des forces reçues par la PPA aux dents porteuses de l’attachement axial. C’est pour cette raison que le recours à ces attachements s’inscrit dans le cadre d’une conception dento-muco-portée (le cas des édentements encastrés court).
- Les attachements à liaison articulée sont ceux qui permettent d’établir une liaison non rigide. La forme de la matrice ménage un espace autour de la patrice, ce qui permet un jeu diminuant les contraintes sur les racines résiduelles en faisant participer la fibro-muqueuse à l’appui prothétique. Ces attachements sont utilisés dans les situations cliniques nécessitant un appui mucoporté (prothèse à extension postérieure) (4).

L’attachement axial type Rhein 83: a- Patrice, b- Matrice, c- La patrice et la matrice associée avec le boitier en acier.


Dans ce cas, nous pouvons justifier l’utilisation d’un attachement axial qui doit être rigide  et comportant trois parties (Fig.7) :
• Une patrice : en résine calcinable, sera incorporée dans la chape à ancrage  radiculaire lors de la sculpture en cire de la chape parabolique,
• Une matrice qui se présente sous forme des anneaux élastiques interchangeables,
• Un boitier en titane ou en acier à insérer dans la résine.
L’attachement axial type Rhein 83 présente une hauteur totale de 2,1mm.


LES ETAPES DE LA REALISATION PROTHETIQUE

Réalisation de l’ancrage supra radiculaire avec attachement axial (10,11,12)

La préparation de la 24 support de la chape à tenon radiculaire respecte les impératifs habituels :
- La préparation du plateau radiculaire qui présente un plan lingual horizontal, un plan vestibulaire incliné et la préparation périphérique du moignon est de  type congé large avec dépouille accentuée, et doit suivre le contour gingival (Fig.8).
- Avant de faire la préparation radiculaire, il est important de faire une obturation radiculaire hermétique. Ensuite, la préparation pour le tenon cylindro-conique doit occuper les 2/3 de la racine et laissant apicalement 3mm d’obturation radiculaire.

 

Pour la préparation radiculaire, nous utilisons des forets gâtes et largo et à la fin pour la mise de dépouille finale du canal on utilise le foret mooser.
- Un entonnoir est réalisé à l’entrée de la préparation canalaire de façon à obtenir une bonne résistance de la pièce prothétique coulée.

La préparation  du plateau radiculaire sur la 24. Empreinte globale.


Après contrôle de la préparation, l’empreinte a été prise selon la technique du double mélange simultané avec tenon en place (Fig.9), sans oublier de prendre l’empreinte antagoniste.
Une fois que les empreintes sont coulées, nous devons procéder à un enregistrement de l’occlusion et une mise en articulateur des moulages de travail en position d’intercuspidation maximale.


Au laboratoire : le prothésiste sculpte dans un premier temps la chape parabolique de l’overdenture en cire.    
- Ensuite, la mise en place de la patrice de l’attachement axial est assuré à l’aide d’un paralléliseur selon l’axe d’insertion choisi de la conception prothétique. Ainsi, la vérification de l’encombrement du système se fait grâce à une clé en silicone, préalablement réalisé sur le montage d’étude (4,8,9) (Fig.10).

 

 

La mise en place de la patrice de l’attachement grâce au paralléliseur et la vérification de l’encombrement du système grâce à une clé en silicone.

 


Après  la mise en cylindre de la maquette en cire de la chape et sa finition, elle sera orientée en clinique pour assurer son essayage en bouche.
Au cours de l’essayage de la chape, nous devons contrôler la parfaite adaptation avec les limites de la préparation, ainsi que l’espace prothétique (Fig.11).

 

 

Essayage en bouche de la chape munie de la patrice de l’attachement axial.

 


Empreinte de travail pour la réalisation du châssis

Les coronoplasties ont été réalisées au niveau des dents supports des crochets, puis l’empreinte de travail a été prise.
C’est une empreinte de situation et anatomique terminale, qui entraine la chape au sein de l’empreinte prise à l’aide d’un porte-empreinte individuel et un polyéther, qui grâce à sa rigidité après la prise nous a permis d’avoir la position exacte de la chape munie de sa patrice au sein de l’empreinte.
Le moulage issu de cette empreinte a été corrigé avec une mise en place de l’élément de réplication et la rondelle d’espacement. Le moulage corrigé ainsi obtenu, a été  dupliqué en revêtement ayant servi à la sculpture de la maquette du châssis selon le tracé prospectif.


Contrôle du châssis, enregistrement de l’occlusion et mise en articulateur

Une fois la coulée du châssis est faite, nous devons commencer par le contrôler sur moulage.
- Dans un deuxième temps, l’ensemble de la prothèse a été essayé en bouche :
A ce stade, nous devons visualiser la parfaite adaptation des éléments du châssis au niveau des préparations amélaire, ainsi qu’au niveau du support ostéo muqueux (Fig.12).

  Essayage en bouche du châssis ; la selle est évidée en regard de la chape pour aménager la place de la résine.  

 


Après la validation de l’essayage de l’ensemble de la prothèse en bouche, un enregistrement de l’occlusion en position d’intercuspidation maximale a été réalisé, suivi d’une mise en articulateur et d’un choix de la teinte des dents prothétiques.


Montage des dents prothétiques  et essayage en bouche

Le montage des dents prothétiques se fait au laboratoire de prothèse en respectant les règles du montage. Il est a noté que la chape surmontée de l’attachement axial a été couverte par une dent prothétique
 En clinique, le praticien commence par contrôler l’occlusion sur articulateur et secondairement  l’essayage se fait en bouche. Une fois ceci est validé, nous passons à la polymérisation.


Mise en bouche de la prothèse

Le jour de la mise en bouche de la prothèse, plusieurs étapes doivent être faites:
- l’équilibration occlusale,
- le scellement de la chape support de la patrice,
- la fixation de la matrice au niveau du boitier en acier, ensuite son placement au niveau de l’intrados de la prothèse à son emplacement préalablement aménagé, le scellement se fait avec la résine à froid châssis en bouche et sous pression occlusale (Fig.13).

 

 

La fixation de la matrice avec la résine à froid.
  La restauration finale est satisfaisante sur le plan esthétique et fonctionnel.  

 


Enfin, des conseils d’hygiène et d’entretien de la prothèse ont été prodigués au patient, en insistant sur l’importance d’un contrôle régulier afin de pérenniser les résultats obtenus (Fig.14).
Il est a noté en cas d’usure de la matrice, elle peut être remplacée, ainsi nous pouvons assurer la longévité de cette conception.

 

CONCLUSION

Le recours aux attachements axiaux dans le traitement des édentements allie esthétique, rétention et confort du patient.
Cependant, une étude préliminaire attentive associée à une connaissance des avantages et des inconvénients de ce système peuvent guider le praticien dans son choix.
Tout ceci nous offre une prothèse intégrée, ce qui est déterminant dans la réussite d’une prothèse composite.


BIBLIOGRAPHIE

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2. K.Jouillié ;  C. Nublat ; J.Margerit
Conception des chassis métalliques pour prévenir les mouvements de bascule des prothèses     amovibles partielles.
Cahiers de prothèse 2003 ; 121 : 65-73
3. M. Begin.
La prothèse partielle amovible Conception et tracés des châssis .
Paris : Quintessence International 2004
4. J. Saloui Hasnaoui ; A. Regragui ; N. Merzouk
Apport du montage directeur dans la conception et la réalisation d’une prothèse amovible partielle supra radiculaire . Stratégie prothétique 2010 ;10(3) :168-194
5. E .Waltmann-C .Taddei -A.Meyer
Intégration esthétique de la prothèse partielle amovible à chassis métallique
 Stratégie prothétique 2002 ;10(5) :53-61
6. J. Schittly
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Réalités cliniques 1998  ;9(4) :423-433
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Racines naturelles et implants au service de l’équilibre prothétique en prothèse amovible complète.
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8. Estelle Shittley
Le montage directeur :Une réalisation incontournable en prothèse composite
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9. J.Schittley
Rôle et conception des prothèses partielles amovibles transitoire
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10. L. Fajri ; F. Benfdil ; A. Abdedine  
Attachement axial en prothèse amovible partielle .Réalisation clinique temps par temps .
Cahiers de prothèse 2007 ;139 :43-49
11. F. Unger ; A. Hootnaert ; Y. Estrabaud.
Indication et mise en œuvre des attachements axiaux supra – radiculaire
Réal clin 1998 ;9(4) :513-23
12. C. Rignon Bret ; J.M. Rignon Bret

Prothèse amovible complète, prothèse immédiate, prothèse supra-radiculaire et implantaire. Paris : édition Cdp ;2002

 

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