J. HAMAMA, L. KHALFI, H. SABANI, M.K. EL KHATIB

Service de Stomatologie et Chirurgie plastique
Hôpital militaire d’instruction Mohammed V - Rabat - Maroc

 

RÉSUMÉ

Le granulome réparateur à cellules géantes (GRCG) ou granulome central à cellules géantes est une lésion bénigne des maxillaires peu fréquente, présentant parfois un comportement agressif. L’aspect macroscopique caractéristique est  "une masse charnue, brune rougeâtre, ressemblant à une pulpe splénique".

 

Actuellement le traitement conventionnel du GRCG est chirurgical et consiste en un curetage associé ou non à une exérèse. Le taux de récidive varie de 11 % à 35 %.

Mots-clés : Granulome réparateur Cellules géantes, Maxillaire, Tumeur, Exérèse.

 

Abstract:

Giant cell reparative granuloma or Central giant cell granuloma (CGCG, classified by the World Health Organization) is an uncommon benign lesion of the jaws although some may demonstrate an aggressive behavior. The characteristic appearance was found as a «fleshy reddish brown mass, looking like a splenic pulp". At present, the conventional treatment of GCRG is surgical removal consisting curettage associated or not to an excision.  The recurrence rate has been defined between11% and 35% in the literature.
Keywords: Reparative Granuloma (CGCG) Giant cells; Maxilla; Tumor; Exeresis.


INTRODUCTION

Le granulome réparateur à cellules géantes (GRCG) ou granulome central à cellules géantes (OMS) est une lésion bénigne des maxillaires peu fréquente, présentant parfois un comportement agressif. Il fut initialement décrit par Jaffe en 1953, comme une réaction de réparation locale. Toutefois, le diagnostic ne sera porté que par l’examen histologique (1).
Notre observation rapporte un cas agressif d’un granulome réparateur à cellules géantes à localisation maxillaire.


OBSERVATION

Il s’agit d’une patiente âgée de 40ans, sans ATCD pathologiques notables qui a  consulté pour une tuméfaction buccale évoluant depuis deux années coïncidant avec des extractions multiples pour mise en état buccodentaire. Cette tuméfaction augmentait progressivement de volume ce qui gênait la confection d’une prothèse dentaire amovible. Par ailleurs ni douleur, ni limitation de l’ouverture buccale n’ont  été rapportées.
L’examen  a  révélé la présence d’une masse charnue brune rougeâtre, ressemblant à une pulpe splénique, comblant  le vestibule buccal supérieur gauche, et occupant la moitié de la crête alvéolaire  maxillaire gauche, dure et très hémorragique à la palpation (Fig 1).

 

Fig.1 : Vue endobuccale montrant une masse charnue brune rougeâtre.

Fig.2 : Image tomodensitométrique en3D montrant le caractère ostéolytique de la tumeur.

 

 

Coupe coronale notant l’effraction du plancher sinusien maxillaire. Masse de densité tissulaire bien limitée ostéolytique respectant la fosse ptérygoïde.


L’examen tomodensitométrique (Fig 2,3,4) a noté une masse de densité tissulaire bien limitée à caractère ostéolytique envahissant la tubérosité maxillaire, la crête alvéolaire  maxillaire   gauche  et le bas fond sinusien mais sans extension à la fosse ptérygoïde.
Une biopsie chirurgicale sous anesthésie locale a été réalisée  dont  le compte-rendu anatomo-pathologique évoquait un granulome réparateur à cellules géantes du maxillaire.

 

Un bilan phosphocalcique a été réalisé afin d’éliminer une tumeur brune des maxillaires secondaire à une hyperparathyroïdie s’est révélée normale.
L’abord chirurgical a été   réalisé sous anesthésie générale par une voie para-latéro-nasale de Weber-Fergusson, ce qui nous a permis une exérèse large (Fig 5).
L’examen anatomo-pathologique (Fig 6) de la pièce opératoire a confirmé le diagnostic de  granulome réparateur à cellules géantes.
Le suivi de notre patiente n’a pas noté de récidive sur un recul d’une année.

 

DISCUSSION

Cette lésion se rencontre plus fréquemment chez les femmes que chez les hommes avec une localisation deux fois plus fréquente à la mandibule qu’au maxillaire. Chez l’homme, le pic d’incidence se situe entre 10 et 14 ans, tandis que chez la femme on le retrouve entre 15 et 19 ans (2). De rares cas sont associés à des anomalies génétiques telles que le Chérubisme, le Syndrome de Noonan ou la Neurofibromatose de type 1.

 

L’étiologie du GRCG est actuellement mal précisée mais l’hypothèse d’une hémorragie intraosseuse post traumatique est plus plausible. Dans la majorité des cas. L’aspect macroscopique caractéristique "une masse charnue, brun rougeâtre, ressemblant à une pulpe splénique" (3). Radiologiquement, une image est décrite allant d’une petite lésion uniloculaire à une importante lésion multiloculaire associée à des déplacements dentaires, des résorptions radiculaires voire des perforations de la  corticale osseuse (4).

 

La vraie difficulté est le diagnostic différentiel avec la tumeur à cellules géante (TCG). La tumeur à  cellules géantes est une lésion localisée la plupart du temps au niveau de l’épiphyse des os longs, entre 20 et 40 ans. La lésion peut être uni ou multiloculaire. Elle ressemble au GRCG surtout au type agressif par une ostéolyse mono ou polygéodique soufflant et perforant les corticales (5). La TCG est brune-rougeâtre parfois en partie nécrotique ou pseudokystique avec de nombreuses cellules géantes dans une matrice pauvre en collagène et riche en cellules fusiformes. Son taux de récidive est nettement plus élevé, près de 50 %, avec un risque de transformation maligne en sarcome de près de 10 à 20 % (5).


Actuellement le traitement conventionnel du GRCG est chirurgical et consiste en un curetage associé ou non à une exérèse. Le taux de récidive varie de 11 % à 35 % (6). Notre observation confirme la supériorité de la chirurgie à limiter  la récidive bien que notre recul  insuffisant.

 

D’autres thérapies moins invasives ont obtenu des résultats favorables avec l’administration intra-lésionnelle de corticostéroïdes (7). Cependant, actuellement, aucune étude clinique contrôlée n’est publiée concernant cette thérapie. D’autres auteurs ont également démontré le rôle favorable de la calcitonine dans le traitement du GRCG (8,9,10).

 

L’Interféron® administré en monothérapie dans le traitement des GRCG agressifs, semble également capable d’interrompre la croissance des lésions, parfois d’en réduire la taille. Il est souvent nécessaire d’ajouter un geste chirurgical pour éliminer la lésion (11,12).
La radiothérapie reste réservée aux cas récidivants ou non résécables.

 

RÉFÉRENCES

1. JAFFE H.L. Giant-cell reparative granuloma, traumatic bone cyst, and fibrous dysplasia of the jawbones. Oral Surg 1953; 6:159-175.
2. DE LANGE J, VAN DEN AKKER H.P., KLIP H. Incidence and disease-free survival after surgical therapy of central giant-cell granulomas of the jaw in The Netherlands: 1990-1995. Head Neck 2004; 26:792-795.
3. SENTHILES C, MICHAUD J.Lésions à cellules géantes du maxillaire. Difficultés diagnostiques. Rev Stomat Chir Maxilfac 1986;87:102-107.
4. STAVROPOULOS F, KATZ J.Central giant cell granulomas: a systematic review of theradiographic characteristics with the addition of 20 new cases. Dentmaxilfac Rad 2003; 31:213-217.
5. BARTHÉLÉMY I, MONDIÉ J-M.Giant cell tumors and pseudogiant cell tumors of the jaws.Rev Stomat chir maxilfac 2009; 110:209-213.
6. DE LANGE J, VAN DEN AKKER H.P. Clinical and radiologic features of central giant cell lesions of the jaw. Oral Surg Oral Med Oral Path Oral Rad Endo 2005; 99:464-470.
7. EL HADIDI YN, GHANEM AA, HELMY I. Injection of steroids intralesional in central giant cell granuloma cases (giant cell tumor): Is it free of systemic complications or not? A case report.Int J Surg Case Rep. 2015; 8C:166-70.
8. DE LANGE J, VAN DEN AKKER H.P., VELDHUIJZENVAN ZANTEN G.O., ENGELSHOVE H.A.,VAN DEN BERG H., KLIP H.Calcitinin therapy in central giant cell granuloma of the jaw:a randomized double-blind placebo-controlled study. Int J Oral Maxilfac Surg 2006 a; 35:791-795.
9. O’REGAN E.M, GIBB D.H., ODELL E.W.Rapid growth of giant cell granuloma in pregnancy treated with calcitonin. Oral Surg Oral Med Oral Path Oral Rad Endod 2001; 92:532-538.
10. POGREL M.A. Calcitonin therapy for central giant cell granuloma. J Oral Maxilfac Surg 2003; 61:649-653.
11. DE LANGE J, VAN DEN AKKER H.P, VAN DEN BERG H., RICHEL D.J, GORTZAK RAT.Limited regression of central giant cell granuloma by interferon alpha after failed calcitonin therapy: a report of two cases. Int J Oral Maxillofac Surg 2006 b; 35:865-869.
12. Victorin .A,  VINCENT. S, DUVILLARD. C,  LARRAS. P, PETRELLA. T, PERRIN .D.Granulome réparateur à cellules géantes du maxillaire : à propos d’un cas .Rev  Odont Stomat 2010;39:135-144
 

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